Aujourd’hui, à cause de la situation environnementale, nombreux s’accordent pour dire qu’un moyen efficace de lutter contre le réchauffement climatique serait de diminuer la consommation et donc, la production mondiale de viande.
On ignore souvent qu’un autre secteur émet encore plus de gaz à effet de serre (GES) que tous les transports réunis. Il s’agit de l’élevage et de la production de produits carnés. Un rapport rédigé par la Food and agriculture organisation (FAO) en 2006 indiquait que « l’élevage intensif des bovins cause davantage de gaz à effet de serre que toute forme de transport : voitures, camions et avions réunis. » La surconsommation de viande à l’échelle planétaire serait responsable d’environ 18% des émissions de gaz à effet de serre. En y regardant de plus près, il semble toutefois que ces informations ne soient pas si nouvelles. Pourtant, la majorité de la population continue de consommer de plus en plus de viande. De 1970 à 2009, la consommation de viande serait passée de 25kg à 28kg par personne et par année [1] .
Pendant ce temps, on coupe des forêts afin de permettre aux producteurs d’avoir une surface d’élevage plus grande. On coupe ces mêmes forêts pour faire la culture du soya qui nourrit les animaux. Et l’on donne autour de 15 000 litres d’eau à un bœuf pour obtenir 1kg de sa viande [2].
Les statistiques sont nombreuses. Les effets aussi. Il est néanmoins possible d’en ressortir que le rythme de production de viande est beaucoup trop rapide pour ce que la planète peut absorber.
Un manque de volonté politique ?
Selon Renée Frappier, professeure et auteure en alimentation naturelle, bien que les questions environnementales touchent de plus en plus de jeunes, le problème de la surconsommation de viande n’est pas encore suffisamment traité dans les médias. D’après madame Frappier, plus cet enjeu sera présenté à travers des documentaires ou autres nouveaux médias accrocheurs, plus on arrivera à toucher les gens et plus ceux-ci seront portés à changer leurs habitudes.
Toutefois, si ce mouvement de conscientisation n’est pas encore généralisé, c’est qu’il semble y avoir un manque de volonté politique. Comme le dit la professeure et auteure, de grandes entreprises font fortune et ne sont pas prêtes à voir la production de viande diminuer. Éric Darier, directeur de Greenpeace Québec est du même avis : « L’industrie de la viande est un lobby puissant - agriculteurs, distributeurs, producteurs d’aliments pour les animaux, détaillants, fast food - qui empêche de voir un changement vers une réduction de la consommation de viande. »
En plus du manque de volonté politique, « il y a beaucoup de déni au niveau individuel », ajoute monsieur Darier. « Ce déni au niveau individuel existe parce que rares sont les institutions qui mettent en pratique les solutions aux problèmes », conclut-il. Il semble donc que si les institutions mettaient davantage en œuvre des pratiques et des programmes, les gens seraient plus portés à modifier quelques-unes de leurs habitudes alimentaires.
Des solutions
Malgré le manque de volonté politique et le déni au niveau individuel, des solutions sont peu à peu proposées afin que la surconsommation de viande « ne nous mène pas vers l’extinction humaine », pour reprendre les mots d’Éric Darier.
« Rien ne pourra être plus bénéfique à la santé humaine ni accroître les chances de survie de la vie sur la Terre, qu’une évolution vers un régime végétarien », disait Albert Einstein. En effet, une solution souvent proposée est de se tourner vers un régime végétarien, ce qui diminuerait drastiquement la production au niveau planétaire.
Cependant, sans prôner un régime complètement végétarien, le plus important serait de miser sur la « réduction de la surproduction ». Une production carnée bien gérée et dimensionnée ne serait pas problématique, soutient Robert Engelman dans un article paru sur le site web du Worldwatch Institute, organisme dont il est le président. Il donne les petites exploitations en exemple. Il s’agit donc de repenser la chaîne « production-consommation » de viande.
Monsieur Darier va dans le même sens en affirmant que « réduire la consommation de viande permettrait de mettre en place une agriculture écologique. Dans certains cas, la présence de bétail permet la production d’engrais naturel. Une agriculture diversifiée incluant du bétail, mais en quantité moindre qu’aujourd’hui, et écologique serait donc une solution. »
Selon lui, il est possible de changer la culture alimentaire : « Après tout, la surconsommation de viande est un phénomène relativement récent. Donc, on peut le renverser ».
De l’espoir
Des initiatives ont aussi vu le jour. Plusieurs associations autour du monde font la promotion d’une journée par semaine « sans viande ». Près de nous, c’est le « lundi sans viande », un « mouvement québécois qui invite à réduire notre apport en viande une journée par semaine pour aider la planète et notre santé » [3].
L’association végétarienne de Montréal propose de nombreuses recettes végétariennes et nous prouve qu’une gastronomie sans viande est possible et tout aussi riche en nutriments.
Finalement, « l’Expo Manger Santé et Vivre Vert », dont madame Frappier est l’organisatrice, aura lieu du 16 au 18 mars à Montréal et les 24 et 25 mars à Québec. Cette exposition se donne comme mission de faire connaître l’importance de la qualité de notre alimentation et de notre mode de vie sur la santé ainsi que sur l’environnement.
Ces trois exemples d’initiatives nous démontrent que le plus efficace sera sans doute de mettre de l’avant des solutions collectives afin de réduire le coût moral aux individus. C’est ce que le directeur de Greenpeace Québec avance : « Adopter une politique alimentaire dans les CPE et les écoles avec une consommation réduite de viande serait plus efficace que d’attendre que tous les parents des enfants soient d’accord pour un nouveau régime alimentaire. »
Laure Waridel, écrivaine et sociologue, disait « Acheter c’est voter ». En ce sens, manger, c’est aussi voter… voter pour une planète moins polluée.