Harper, Bush et Calderon à la Nouvelle-Orléans

Open for Business

jeudi 1er mai 2008, par Gabrièle Briggs

Le premier ministre du Canada et les présidents des États-Unis et du Mexique se sont réunis à la fin avril pour discuter du Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité (PSP). Pour George Bush, le choix de la Nouvelle-Orléans s’imposait pour montrer que la ville est plus que jamais open for business, trois ans après le ravage de Katrina.

Les organismes altermondialistes et les syndicats du Canada, des États-Unis et du Mexique qui se réunissaient en même temps à la Nouvelle-Orléans lors du Sommet des peuples constatent qu’il faut prendre au mot le président américain.

La mainmise du secteur privé sur le PSP est ce qui inquiète le plus les participants du Sommet des peuples. Le Conseil nord-américain de la compétitivité, regroupant 30 dirigeants d’entreprises venant à parts égales des États-Unis, du Canada et du Mexique, est aux premières loges lors des discussions entourant le partenariat. Ces hommes d’affaires sont explicitement mandatés pour « formuler des recommandations et faire connaître les priorités concernant la promotion de la compétitivité nord-américaine à l’échelle mondiale », selon le gouvernement du Canada. Ces mécanismes d’influence sont « soustraits à la surveillance démocratique des parlementaires, car le PSP n’est pas un accord formel, avec une signature », mentionne Pierre-Yves Serinet, du Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC).

Le privé lorgne l’énergie

L’énergie est une autre source d’inquiétudes. Les syndicats de ce secteur du Canada, des États-Unis et du Mexique ont d’ailleurs organisé un deuxième contre-sommet à la Nouvelle-Orléans, le dimanche 20 avril, avant de rejoindre le Sommet des peuples. Dans le secteur énergétique aussi, l’ombre du secteur privé plane sur les sociétés d’État. La vente de PEMEX, l’entreprise publique mexicaine du pétrole, fait craindre le pire aux syndicats.

Ceux-ci s’entendent pour que l’énergie soit considérée comme un droit humain fondamental appartenant aux communautés productrices. Mais dans les accords de libre-échange, elle est considérée comme une marchandise et est régie par un principe de proportionnalité. « Lorsqu’un pays échange de l’énergie avec un autre, il se doit de continuer dans cette même proportion ou d’augmenter le volume des exportations », explique Claude Généreux du Syndicat canadien de la fonction publique. Il craint qu’en raison de cette clause, le Canada et le Mexique perdent peu à peu leur souveraineté sur leurs ressources énergétiques au détriment des États-Unis.

Entre-temps, les syndicats présents se sont entendus pour maintenir un réseau de liaisons entre les regroupements canadiens, américains et mexicains. Une délégation canadienne se rendra par ailleurs au Mexique pour appuyer les travailleurs de PEMEX qui luttent contre la privatisation de la société d’État.

L’exemple désolant de la Nouvelle-Orléans

Pour les hôtes du Sommet des peuples, la rencontre fut aussi le moment de démontrer l’état de délabrement dans lequel se trouve toujours la Nouvelle-Orléans. Comme l’explique Pierre-Yves Serinet, la plus grande ville de Louisiane est une preuve des impacts négatifs de l’ALENA et du PSP.

12 000 sinistrés de l’ouragan sont toujours dispersés sur le territoire américain. Les terrains dévastés sont la cible de la spéculation immobilière. « C’est une ruée vers l’or aux dépens des déplacés », s’indigne M. Serinet.

La ville subit une profonde transformation sociale avec l’arrivée massive de travailleurs étrangers, majoritairement du Mexique, engagés pour reconstruire la ville. Ces travailleurs déchantent rapidement lorsqu’ils reçoivent leur salaire : 3 à 4 $ par jour. « C’est ça la migration ciblée des travailleurs », explique le porte-parole du RICQ.

Claude Généreux a participé à la visite du Lower Ninth Ward, l’un des quartiers les plus touchés par Katrina. La situation « est pire qu’au Ghana ou qu’en Haïti. Il n’y a plus de services à la communauté, pas d’électricité, pas de noms de rues », dénonce-t-il. Le gouvernement américain semble ici jouer un double jeu. D’un côté, il n’apporte aucune aide gouvernementale aux sinistrés, de l’autre il dit que les services publics ne fonctionnent pas et qu’il faut les privatiser.

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