Minuit moins cinq

jeudi 23 août 2007, par Marie-Hélène Bonin

À l’aube du premier Forum social québécois, les preuves de la faillite de l’ordre économique actuel sont évidentes pour tous. Cet ordre consacre les inégalités sociales au nom de la libre entreprise, il provoque la destruction des conditions mêmes de la vie au nom de la prospérité, il entraîne la dépendance aux hydrocarbures en provoquant des guerres cruelles apparemment sans issue.

À l’aube du premier Forum social québécois, les preuves de la faillite de l’ordre économique actuel sont évidentes pour tous. Cet ordre consacre les inégalités sociales au nom de la libre entreprise, il provoque la destruction des conditions mêmes de la vie au nom de la prospérité, il entraîne la dépendance aux hydrocarbures en provoquant des guerres cruelles apparemment sans issue.

Malgré tout, les victimes de cet ordre social résistent, persistent et signent ! Partout un même appel retentit, quel que soit la langue ou le pays :

Faut se ruer dans la rue,
au printemps comme une crue
Faire éclater notre ras-le-bol,
une débâcle de casseroles
Trêve de paroles, faites du bruit !
Un charivari pour chavirer ce parti,
comme en Argentine, en Bolivie.

(Loco Locass)

Les forums sociaux mondiaux depuis maintenant plusieurs années ont été autant d’occasions « manifestives » de réaffirmer ces luttes, de célébrer ces victoires.

Et pourtant, il y a un paradoxe.

En dépit de la faillite patente de ce nouvel ordre mondial, en dépit des résistances souvent victorieuses ici et là, en dépit du sentiment d’urgence d’agir avant que l’irréparable ne se produise, il n’en reste pas moins difficile de formuler un nouveau projet social inspirant et, par là-même, réalisable.

Le Québec compte pourtant sur une riche tradition de mouvements sociaux forts et innovateurs dont nous pouvons être fiers. Ce patrimoine inspirant, enrichi des plus récents apports des jeunes et des communautés immigrantes, nous a permis jusqu’à présent d’éviter bien des écueils : guerre en Irak, délocalisation de nombre d’emplois, projets du Suroît et du mont Orford, réforme du régime des prêts et bourses, privatisation de la santé, et encore.

Par contre, il faut être conscient que les défis auxquels nous faisons face ne sont pas les mêmes qu’il y a trente ans ou quarante ans. Faut-il le rappeler, nous sommes maintenant en guerre en Afghanistan. Et nous sommes gouvernés par un partenariat-public-privé (PPP) où le rôle de l’État a été redéfini sans qu’on ait rien à y dire, où les politiques publiques sont décidées par des multinationales et par des organes supranationaux qui n’ont de compte à rendre à personne.

Face à ces nouvelles réalités qu’apporte la mondialisation, nos traditions militantes constituent un héritage précieux, mais elles ne suffiront pas. Il faut un nouveau souffle, des idées et des énergies nouvelles pour réaliser ce monde auquel nous aspirons, mais qui continue de nous échapper.

C’est à ce brassage de traditions, de rêves et de résistances que ce premier Forum social québécois nous convie. Qu’en sortira-t-il ? À première vue, peut-être peu de choses. Mais d’espoir nul ne peut se priver pour entreprendre ce long portage vers un nouveau monde à inventer. Il est minuit moins cinq, plus de temps à perdre !


L’auteure est directrice générale d’Alternatives

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