Pour beaucoup de citoyens, l’affaire Maher Arar a illustré la dérive à laquelle peut conduire la logique sécuritaire. Les perquisitions récentes de la GRC chez une journaliste du Ottawa Citizen, en vertu de la Loi sur la protection de l’information, ont aussi soulevé l’indignation dans plusieurs milieux préoccupés par la liberté de presse. Sous la pression de l’opinion publique, le gouvernement fédéral a finalement annoncé une enquête publique sur l’affaire Arar et promis une modification de la Loi sur la protection de l’information.
La campagne, lancée par la Ligue, veut mettre en lumière les dispositions et pratiques qui pèsent lourdement sur les droits et libertés : la création d’un mégafichier d’information sur les voyageurs, le recours accru aux « certificats de sécurité », les arrestations préventives et massives lors de manifestations, le recours fréquent à la détention de demandeurs du statut de réfugié, le projet de surveillance des communications électroniques Accès Légal et, bien sûr, la loi antiterroriste C-36, adoptée en décembre 2001.
En vertu de cette dernière législation, une infraction commise dans un but idéologique, religieux ou politique peut dorénavant être qualifiée d’activité terroriste. Cette qualification permet l’application de procédures extraordinaires ne respectant pas les garanties judiciaires normalement reconnues aux suspects et remettant en question la présomption d’innocence, le droit à un procès équitable, à une défense pleine et entière ainsi que le droit au silence. Les personnes ou organisations qui contestent plus vigoureusement l’ordre établi risquent d’être victimes de ces mesures. Une loi que même l’ex-directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, Reid Morden, considère excessive et dangereuse pour les droits et libertés, à cause de sa définition large et ambiguë des activités terroristes et de ses pouvoirs de détention préventive et d’enquête sans mandat.
Selon Dominic Peschard, militant au sein du Comité de surveillance de la Ligue des droits et libertés, « il faut lancer un mouvement pour que ces questions soient discutées plus largement dans les organisations ». Il souligne qu’il est important pour les citoyens de s’unir, afin d’exiger que les autorités canadiennes revoient leur position.
Karine Girard