Le plus souvent, les enfants de ces esclaves modernes n’osent même pas s’aventurer en dehors de leurs quartiers misérables, de peur d’être capturés par les autorités dominicaines et expédiés en Haïti, un pays qu’ils n’ont souvent jamais connu.
L’un des moments forts du documentaire mérite qu’on s’y attarde. Avec une caméra dissimulée, la cinéaste parvient à démontrer la complicité qui existe entre les trafiquants d’esclaves et l’administration dominicaine, depuis le ministre jusqu’au douanier, en passant par le policier et le soldat. Apparemment, tout le monde se donne le mot pour satisfaire les besoins de main d’œuvre des grandes sucreries. De l’autre côté de la frontière, en Haïti, on trouve même des « rabatteurs » qui parcourent les villages pour inciter les jeunes à venir travailler dans les grandes plantations de canne à sucre de la République dominicaine.
Le formidable documentaire d’Amy Serrano rappelle qu’on trouve désormais plus d’esclaves à travers le monde qu’aux pires moments de la traite des Noirs. Environ 25 millions, selon l’Organisation mondiale du travail (OMT). Les Haïtiens des bateys ne sont malheureusement qu’un cas parmi tant d’autres.
Voyageur, toi qui est venu prendre du bon temps sur une plage de la République dominicaine, souviens-toi des damnés de la canne à sucre. À deux pas de ton petit paradis, ceux-là ne sont nés que pour souffrir et être humiliés. Encore et toujours. Leurs conditions de vie, parions que même ton chien ou ton chat n’en voudrait pas...