Il a été donné à peu d’individus d’entrer de leur vivant dans leur immortalité. Leila Alaoui, photographe-vidéaste, a eu ce bonheur pour avoir honoré son métier et servi les causes les plus nobles.
Qui dit Leila, dit créativité, humanisme, libre pensée. Elle fut, malgré son jeune âge, un grand exemple des cœurs altruistes et des esprits dévoués, contre l’indifférence et l’insensibilité, pour la liberté et la lumière.
Alors qu’on la croyait tirée d’affaire, la nouvelle, tombée comme un couperet, a plongé le milieu de la photographie dans la stupéfaction : Leila Alaoui est morte le 18 janvier dernier dans une clinique de la capitale burkinabè « des suites d’un arrêt cardiaque » dû à des complications postopératoires, selon la dépêche de l’agence de presse marocaine MAP. Elle a été touchée devant la brasserie-café Cappuccino située aux cotés de l’hôtel Splendid, par cinq balles lors de l’attentat revendiqué par AQMI (Al-Qaida au Maghreb islamique) à Ouagadougou, où elle s’était rendue dans le cadre d’un projet de documentaire sur les violences faites aux femmes en Afrique de l’Ouest.
Née le 10 juillet 1982 à Paris, Leila Alaoui avait étudié à l’université de la Ville de New York. Son début de carrière a été marqué par sa participation à quelques expositions à Madrid, Paris ou Amsterdam.
Dès lors, la jeune photographe attire l’attention du public. Sept ans de fécondité artistique sans arrêt lui feront produire plusieurs expositions, dans lesquelles il n’y a que du sublime, où elle échappait aux atteintes du conventionnel. Elle a aussi publié dans des supports de renom comme le New York Times et Vogue.
Le goût des voyages lui est venu, elle part, visite à divers intervalles, la France, le Liban, le Sénégal, l’Italie, excursionne partout et se complaît dans une vie aussi passionnante qu’enrichissante.
Pionnière de la diversité culturelle, « Les Marocains », un des derniers projets initiés par Leila Alaoui, a parfaitement illustré cette thématique dans toutes ses facettes. Le projet mettait en lumière la diversité des communautés du Maroc, leurs modes de vie et leurs traits spécifiques. « Puisant dans mon propre héritage, j’ai séjourné au sein de diverses communautés et utilisé le filtre de ma position intime de Marocaine de naissance pour révéler, dans ces portraits, la subjectivité des personnes que j’ai photographiées » expliquait la photographe, dans le texte de présentation de son projet.
Son génie dominait ses travaux. « Ma mission, avant tout, est sociale », affirmait-elle en 2011 à un magazine marocain. La condition humaine, par elle, rayonnait de mille éclats. Son talent s’est mêlé à l’amour des choses et des affections désintéressées, à ce qu’il eut de plus généreux ou de plus brillant, de plus saisissant et de plus élevé, à l’histoire moderne et à l’histoire traditionnelle de tous ces individus qu’elle a charmés, consolés, photographiés, embrasés de finesse ou de suavité. Quelle âme, surtout celles qui l’ont côtoyée de près, ne lui a été redevable et des plus nobles impressions de l’art et des plus fortes sensations ?
Pendant plusieurs années, le talent de cette héroïne de l’humanité a été en faveur des faibles, des opprimés, des déshérités, pour la défense de l’indigent, de la femme, de l’enfant, pour la vénération de la vie. Elle fut une sensitive, une panthéiste, qui mêla son âme raffinée au torrent de la condition universelle.
Leila Alaoui a senti jusqu’au fond de l’âme, jusqu’à la pénétration la plus aiguë, la beauté comme le néant des natures humaines. Son talent, son inventivité et sa pensée créatrice demeureront éternels.