Le bien commun pour Montréal

vendredi 26 septembre 2003, par Ariane ÉMOND

Est-ce que ça nous fera avancer ou reculer collectivement ? C’est la question toute bête que je me pose toujours quand j’essaie de me faire une idée sur un enjeu social et des propositions annoncées pour y répondre.Cette question me hante alors que je retiens mon souffle, comme tout le monde, face au sort que le gouvernement Charest semble réserver à la nouvelle ville de Montréal.

Ce qui se joue en commission parlementaire ces jours-ci est capital pour l’avenir du Québec tout entier. Le gouvernement proposera dans quelques mois les règles du jeu qui baliseront les consultations référendaires autour des nouvelles villes.

Il est clair pour moi qu’un courant de défusion nous fera reculer collectivement, ralentira considérablement l’essor de la métropole prise en otage depuis le changement de garde à Québec. Un mouvement, même limité, favorisant les défusions enverra un message clair et déprimant : celui d’un séparatisme primaire, allergique au développement solidaire et inclusif pour l’ensemble de la population qui vit mais aussi qui profite de Montréal.

Plus qu’un vœu pieu martelé comme un mantra par le premier ministre affirmant souhaiter « la réussite des nouvelles villes », ce sont des signes tangibles d’une véritable volonté politique en faveur de ces nouvelles agglomérations que les citoyens du Québec attendent. Le double discours du gouvernement en place est intenable politiquement et menaçant pour le bien commun.

Mesure-t-on vraiment les coûts économiques, sociaux et culturels d’un charcutage de Montréal d’ici un an ?
Les Montréalais ne sont pas dupes et commencent à exprimer de plus en plus clairement leur mécontentement à l’idée de voir la nouvelle ville sombrer dans la tourmente des référendums prodéfusion, quasi inévitables dans le guêpier actuel. L’amputation de Montréal serait catastrophique et ce scénario appréhendé bousille actuellement l’envol de projets porteurs sur les plans culturel et économique. Mais la dernière campagne électorale du Parti libéral a gonflé en quelque sorte le vent dans les voiles défusionnistes. Le gouvernement est-il conscient qu’il peut aussi récolter la tempête ?
Les chiffres parlent déjà : 54 % des Montréalais sont en faveur de la nouvelle ville résultant d’une fusion, par ailleurs bien mal expliquée. Et plus de 67 % des Montréalais francophones ne veulent pas entendre parler de défusion de cette nouvelle entité.

Les observateurs de la scène municipale, les gens d’affaires, les milieux culturels, certains leaders syndicaux et universitaires voient bien dans quel bourbier patauge le gouvernement. Ces derniers jours, ils ont contribué au débat en faisant des propositions constructives et démocratiques. Coincé entre la consultation promise à une minorité de citoyens frustrés de la fusion de leur ancienne municipalité et une vision ample et généreuse pour l’avenir des grands ensembles urbains, le gouvernement doit faire son nid.

Les grandes villes, appelées à former avec d’autres des villes-régions, seront les véritables pôles économiques et culturels des collectivités humaines au XXIe siècle. La modernisation du Québec passe par la vitalisation de ses grands pôles urbains. Il serait temps que le gouvernement accorde son discours autour de la modernisation avec de réelles intentions pour la promouvoir efficacement.

Ariane Émond, journal Alternatives


L’auteure est directrice générale de Culture Montréal.

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