Le Plan Nord, ce projet de développement économique qui a permis, en partie, à Jean Charest de gagner les élections de 2008, vise à développer le Nord du Québec à partir du 49e parallèle par des activités industrielles minières, forestières et énergétiques. En idée depuis 2005, en mode travail depuis 2008 et lancé officiellement en mai 2011, Jean Charest présente le Plan Nord comme un projet de société pour le Québec et comme un modèle mondial de développement durable.
Le développement durable à toutes les sauces…
Depuis plusieurs années, le développement durable est vu comme le sauveur de tous types de développement. Utilisé et réfléchi comme il l’est de nos jours, le développement durable est synonyme de peinture verte. Alors qu’il devrait plutôt tendre vers un équilibre entre le social, l’environnemental et l’économique, le concept mise avant tout sur la sphère économique avec une forte tendance capitaliste. Le raisonnement est simple. Le développement apparaît comme incontournable. Alors, autant être rentable du point de vue financier. Mais à quel prix ?
Originalement, le développement durable est un concept qui a été élaboré (sur papier du moins) dans les années 1980. À la base, il se définit comme suit :
« Le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion :
- le concept de "besoins", et plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis, à qui il convient d’accorder la plus grande priorité, et
- l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir. » Rapport Bruntland, 1987
Au-delà des dimensions sociale, environnementale et économique et du principe des générations futures, il faut donc prendre en compte les plus vulnérables et garder à l’esprit que la technologie et nos sociétés ont des limites qui sont imposées par l’environnement et la nature.
Un projet qui a pour sous-titre « Le chantier d’une génération » peut-il alors être qualifié de développement durable ? Est-ce que cela semble tourné vers l’avenir ? L’horizon de 25 ans (2010 à 2035) choisi par les libéraux semble bien loin de ce que prônent les communautés autochtones, soit de penser aux sept générations futures !
De plus, un développement peut-il être durable considérant que les ressources sont pour la plupart non renouvelables ? Dans le Plan Nord, le développement durable m’apparaît comme une façon politiquement correcte de justifier un développement traditionnel. « Extirpons les ressources minières du sous-sol québécois sans grandes redevances minières et sans que nous soyons responsables des désastres écologiques ! Profitons-en, avant qu’ils et elles ne se rendent compte de l’arnaque ! » On dirait que c’est comme cela que la filiale minière fonctionne !
Le grand projet de société de M. Charest est axé sur les activités industrielles, ne nous faisons pas d’illusion. La protection du 50 % du territoire n’est qu’un écran de fumée pour « calmer » les environnementalistes, qui, de toute façon, n’ont rien à craindre tant qu’ils et elles ne prennent pas position. Les écologistes par contre tendent à bien voir le jeu politique et n’hésitent pas à parler haut et fort.
Le Plan Nord, un plan qui doit être mort
Parce que ce n’est pas un projet rassembleur. Parce qu’il n’est pas parti du bon pied. Parce qu’il ne prend pas en compte les besoins réels des gens du Nord qui ont d’autres besoins que de travailler. Parce que les femmes autochtones et allochtones sont les grandes oubliées du Plan Nord. Parce que même si Jean Charest dit le contraire, nous savons qu’il y aura du favoritisme dans les différents processus. Parce que l’environnement passe en dernier. Parce que les dernières grandes rivières sont/seront menacées d’être arnachées. Parce que pour les gens du Sud qui ne connaissent pas ou peu le Nord, les impacts des changements climatiques, les espèces menacées, les territoires de migration, etc., ceux-ci disent au Nord comment il faut se développer en adoptant une attitude trop proche du colonialisme. Parce que nous n’avons pas besoin de consommer et de produire autant. Et pour plusieurs autres raisons encore, le Plan Nord ne doit pas continuer. Peut-être faut-il développer le Nord. Peut-être ne faut-il pas le développer. Mais pourrions-nous commencer par y voir avec les gens qui y habitent, humains comme non humains ?