En décembre, le président Morales respectait sa principale promesse électorale avec la présentation d’une nouvelle constitution, qui doit être adoptée ce printemps par référendum. Si elle est approuvée, cette constitution devrait permettre à son gouvernement de mettre en œuvre des réformes politiques, économiques et sociales pour assurer les droits fondamentaux aux peuples indigènes, marginalisés depuis plus de 500 ans. Mais les partis d’opposition la dénoncent et l’instabilité politique persiste.
Un dialogue difficile
Le processus d’élaboration d’une nouvelle constitution fut le théâtre d’affrontements violents entre les opposants de Morales et ceux qui défendent le projet de refondation de la Bolivie. Comme l’a expliqué le vice-président de la Bolivie, Alvaro Garcia Linera, tant que l’antagonisme entre les deux blocs ne se résout pas, il impossible de construire un leadership politique à l’échelle nationale.
Afin de tenter de surmonter cette crise qui mine présentement le pays, le gouvernement du MAS entame sa troisième année au pouvoir par un dialogue avec ses opposants. Après avoir tenté de faire dérailler l’assemblée constituante chargée d’écrire la nouvelle constitution, les partis d’opposition, le parti Podemos en tête, suivi de l’Unité nationale et du Mouvement nationaliste révolutionnaire, réclament maintenant que la constitution soit révisée.
Ils accusent Evo Morales de vouloir concentrer le pouvoir par des politiques centralistes grâce à une constitution qu’ils jugent illégitime. Basée dans la région de la Media Luna (qui comprend les départements de Santa Cruz, Tarija, Beni et Pando), là où se trouvent les principales ressources naturelles du pays, l’opposition dénonce surtout l’imposition de redevances pétrolières par l’État central, qu’Evo Morales entend redistribuer par le biais de programmes sociaux.
Or, les dirigeants des départements de la Media Luna interprètent cette mesure comme étant totalitaire, puisque, selon eux, elle sous-entend la confiscation de la gestion de leurs ressources naturelles. Ils rejettent donc le projet de nouvelle constitution et continuent de faire pression sur le président pour ne pas perdre leurs privilèges. Ces partis de droite, conservateurs, résistent aux transformations proposées par le gouvernement, et certains menacent même de se séparer s’ils n’obtiennent pas gain de cause.
Evo Morales tente donc d’atténuer la grogne de ses opposants et de faire avancer sa constitution en ouvrant une valse de négociations. Il a d’abord invité les préfets de tous les départements à revoir ce document et à fournir leurs commentaires.
Le président bolivien est également disposé à tenir un référendum révocatoire si jamais le dialogue échouait. Par cette stratégie, il espère aussi faire taire les accusations de totalitarisme qui s’acharnent contre lui, en démontrant qu’il est démocrate et ouvert au dialogue. Pourtant, le fossé politique dans lequel la Bolivie est plongée semble insurmontable ! À quoi bon danser avec ses opposants si c’est pour se marcher sur les pieds ?
Le pari du président
Evo Morales mise gros en ouvrant une ronde de négociations avec une opposition féroce qui ne laisse entrevoir aucun compromis à l’horizon. Le MAS au pouvoir saura-t-il maintenir ses promesses et devenir l’instrument politique de libération des peuples opprimés ? Avec deux référendums prévus cette année, l’un pour l’adoption ou le rejet de la nouvelle constitution, et l’autre pour la continuité ou la révocation de la présidence même d’Evo Morales, on peut s’attendre à ce que le climat politique en Bolivie demeure tendu.