Depuis, le PLQ a été porté au pouvoir, Mme Beauchamp a hérité du ministère auquel on la destinait, et les artistes et autres intervenants du milieu culturel ont pu constater concrètement la forme qu’allaient prendre les engagements des troupes dites « libérales » (quel beau détournement de sens, ne trouvez-vous pas ?) de Jean Charest à l’égard de la « chose culturelle ». En l’occurrence, rien que dans le domaine du livre : diminution des crédits d’impôt aux éditeurs, des budgets d’achats de livres des bibliothèques, suppression en bonne et dûe forme des programmes de « développement à la lecture » ainsi que de soutien et de structuration des librairies, et j’en passe… Quelle aberration ! Promettre un soutien aux créateurs puis mettre à mal les infrastructures sans lesquelles la diffusion de leurs œuvres est inconcevable !
En somme, tout porte à croire que cette administration libérale de nom, ultra-conservatrice dans les faits, considère le livre en particulier et la culture en général comme un secteur sans aucune importance, où l’on peut couper à loisir sans jamais s’inquiéter des répercussions. En conclusion du discours de présentation de son budget, le ministre des Finances, Yves Séguin, a eu le culot de nous servir une paraphrase éhontée d’un mot célèbre de JFK pour inviter ses concitoyens à se demander ce qu’ils peuvent faire sans l’État. Peut-être faudrait-il rappeler à ce monsieur qu’une culture nationale ne peut survivre dans l’exiguïté d’un marché comme le nôtre sans un financement adéquat.
Loin de moi l’idée que la littérature et la culture en général aient préséance sur quelque autre domaine que ce soit en matière de financement public. Je ne crois pas qu’il soit sain de mettre dos à dos les secteurs où ces deniers sont essentiels et de créer entre eux quelque rivalité. Mais je m’étonne que nos champions de la supposée réingénierie du Québec moderne, qui prétendent avoir l’avenir de cette nation à cœur et ne jurent que par l’éducation, semblent faire abstraction du lien fondamental qui justement unit la culture et sa diffusion à l’éducation.
Stanley Péan, chroniqueur culturel, journal Alternatives