L’idée peut sembler anodine : descendre le grid, cette structure métallique sur laquelle repose les éclairages, et le transformer en scène, en toile de projection ou autres besoins scénographiques. C’est néanmoins en tant que prétexte à réflexion sur les réseaux qui organisent nos vies, notre monde, que cette nouvelle exploration du NTE s’avère audacieuse et éloquente.
Réseaux d’information, énergétiques, d’influences, diplomatiques, terroristes, de création, de solidarité ou de transport, le concept apparaît parfois galvaudé. Daniel Brière et Alexis Martin nous démontrent malgré tout que c’est à travers ces derniers, en dépit de leur fragilité, que s’organise le pouvoir, d’exploitation comme de résistance.
La pièce est constituée d’une série de tableaux, du producer Mangione à l’horaire surchargé aux créateurs d’animation japonais qui, après avoir trouvé le cœur des réseaux à détruire, pourront ainsi distancer tous les films catastrophe du genre. Un interlude en compagnie du consul général de l’Inde nous annonce les nouvelles relations entre le Nouveau théâtre expérimental et... New Delhi, à l’image des liens de solidarité Inde-Québec.
La pièce propose également d’inimaginables trouvailles, véritables poèmes sonores et visuels. Cette fresque muette en ombres chinoises, où se superposent des dessins de Lascaux, l’image d’une ville bombardée et les formes de Guernica dénoncent la barbarie du 11 septembre. Ou encore ces astronautes suspendus au grid en mouvement, alors que le Clair de lune de Debussy renforce la légèreté de l’apesanteur.
Eh oui, avouons-le, on se marre éperdument. Sans évacuer une nécessaire critique sociale, les auteurs-comédiens nous épargnent la leçon pompeuse, mariant à merveille le tragique de la destruction de la Manic au ridicule d’un godzilla en plastic, projection vidéo live surdimensionnée en prime. À voir, résolument.