Plusieurs films, une même préoccupation : porter à l’écran les effets dévastateurs de la guerre sur les populations. Véritable alliance de l’art du documentaire et de la politique, les oeuvres du cinéaste québécois Martin Duckworth lui ont récemment valu le titre d’Artiste québécois de la paix 2002.
« C’est de mes parents que vient ma passion pour le mouvement pacifique », affirme-t-il d’entrée de jeu. Sa mère, la militante Muriel Duckworth, a joué un rôle d’avant-plan dans la fondation de l’organisation La Voix des femmes canadiennes pour la paix, une organisation non gouvernementale fondée en 1960 qui a pour but la promotion de la paix et du désarmement auprès du gouvernement canadien. Documentariste, réalisateur et caméraman indépendant depuis 1970, Martin Duckworth s’est vu décerner plusieurs récompenses un peu partout à travers le monde. Parmi les 26 documentaires qu’il a réalisés, mentionnons notamment Armé pour la paix. Point de vue sur la guerre du Golfe, regard critique sur la Seconde Guerre mondiale, la guerre du Golfe et la participation des soldats canadiens dans cette lutte menée par les Américains, Retour à Dresden, qui retrace l’histoire d’un ami retourné dans une ville allemande qu’il a bombardé pendant la Seconde Guerre mondiale, et Plus jamais d’Hibakusha !, un film touchant sur les survivants de la bombe atomique d’Hiroshima. À travers les témoignages des victimes de la guerre, Martin Duckworth porte à l’écran ses convictions pacifiques et le sentiment d’impuissance des victimes de la guerre. En tant que cinéaste, il considère avoir « l’obligation d’utiliser [ses] talents et aptitudes pour immuniser et socialiser le monde, ce qui est assez difficile sous l’empire américain ».
Les femmes jouent un grand rôle dans la vie de Martin Duckworth. Sa compagne représente d’ailleurs la famille au sein du Collectif Échec à la guerre. Selon le cinéaste, « les femmes sont plus efficaces dans le mouvement de gauche parce qu’elles combinent la compréhension, l’articulation et la compassion dans un meilleur équilibre que les hommes en général ».
Après ses débuts à l’Office national du film (ONF) en 1963, il est rapidement devenu cinéaste indépendant. Il est pigiste depuis maintenant 33 ans, « une situation qui [l’]a rendu plus proche du monde ordinaire, dans leur lutte pour la survie économique ». Il rappelle qu’il est difficile de vivre comme pigiste, mais que cette situation le place dans la position de la majorité. « On est dans la même lutte que le reste du monde, pour gagner un meilleur mode de vie et de redistribution des richesses. »
Il est également difficile de gagner sa vie en tant qu’artiste, sans avoir au moins une autre source de revenus. Beaucoup gagnent leur vie grâce à l’art thérapeutique, une réalité qu’il a découvert lors du tournage du documentaire Les yeux du cœur en 1994. Pour arrondir les fins de mois, il est également directeur photo et enseigne la production cinématographique à l’Université Concordia. Sa nomination d’Artiste québécois de la paix 2002, faisant suite, entre autres, à celles de Simone Monet-Chartrand et Marcelle Ferron, a été un honneur pour Martin Duckworth. Celui qui a grandi dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce à Montréal était particulièrement fier d’être reconnu comme membre de la communauté artistique québécoise .
Le cinéaste a récemment filmé les manifestations montréalaises contre la guerre en Irak et a l’intention de monter un film sur le sujet avec Louise Lemelin, une autre réalisatrice québécoise. Les temps changent, mais pour Martin Duckworth, le message de paix demeure le même.