Des militants des quatre coins du monde réunis à Montréal

mercredi 29 juin 2011, par Émilie Couture-Brière

Plus d’une centaine de défenseurs des droits de la personne issus de 53 pays différents sont venus à Montréal du 5 au 24 juin dernier pour participer à la 32e édition du Programme international de formation aux droits humains (PIFDH) organisé par Equitas. Ces individus, sélectionnés pour leur qualité de militant, se sont réunis pendant trois semaines consécutives au campus du Cégep John Abbott à Sainte-Anne-de-Bellevue pour approfondir leur compréhension de l’éducation aux droits de l’homme.

Un séjour de formation aux droits humains

Trois semaines à vivre ensemble, à partager repas et activités, à mettre en commun des expériences humaines riches et inspirantes. Il s’agit d’une expérience hors du commun que propose Equitas, année après année, aux activistes du monde entier.

Comme le soulignait en cérémonie d’ouverture Alona Horova, ancienne participante du PIFDH et militante pour les droits de la personne en Ukraine, « le programme permet non seulement d’acquérir des connaissances, mais aussi de partager nos convictions personnelles. Il crée une culture de confiance et de respect des autres. »

La plupart des participants étant issus de pays où la démocratie et la liberté d’expression ne sont pas chose acquise (Égypte, Afghanistan, Congo, etc.), on peut facilement imaginer qu’il faut une dose de courage chez les participants pour raconter ouvertement leur combat. Selon Mme Horova, le programme d’été d’Equitas réussit à créer cette atmosphère propice et indispensable à l’échange.

Au programme : formations avec des experts en droits de l’homme, ateliers spécialisés, conférences, table ronde. Le séjour comprend aussi quelques activités de socialisation comme un souper en famille québécoise et une soirée culturelle où les mets et danses traditionnelles des différents pays sont au rendez-vous.

Des individus inspirants

Choisis parmi plus de 800 candidatures, les participants ont tous des feuilles de route impressionnantes.

Eudoxie Bakumba, par exemple, est chargée de programme de l’ONG « Femmes chrétiennes pour la démocratie et le développement » à Kinshasa et également le point focal d’une campagne lancée en 2010 contre le mariage forcé en République démocratique du Congo. Mme Bakumba n’en est pas à sa première sortie hors du pays. Elle parle avec force et sait se faire entendre. « Nous voulons amener les femmes à participer à la gestion et aux questions d’intérêt du pays, dit-elle avec conviction. Souvent, elles ne sont pas au courant de leurs droits en tant que citoyennes. » Son organisation offre, entre autres, des ressources aux nombreuses femmes victimes de violence sexuelle. « En plus d’aider les femmes, nous voulons sensibiliser la population. Beaucoup de nos campagnes d’information s’adressent plus particulièrement aux hommes du pays », explique-t-elle. À propos de l’efficacité de son combat, Bakumba répond : « Nos initiatives sont bien reçues, même chez la population masculine. Maintenant, j’ai beaucoup d’espoir que les choses puissent changer. »

À côté d’elle est assis Harouna Coulibaly, ingénieur géologue et président d’Horizon pour le développement au Mali. M. Coulibaly a la tête pleine de projets pour son organisation et pour son pays. « Le Mali est un pays qui se porte relativement bien en Afrique de l’Ouest, mais il faut continuer d’éduquer notre jeunesse. Tout passe par l’éducation », dit-il. M. Coulibaly a démarré son ONG en 2003 avec des collègues universitaires issus de différents domaines. Depuis, son projet n’a cessé de grandir et ses initiatives ont trouvé un écho sur l’ensemble du territoire malien. « Nous faisons beaucoup de sensibilisation dans les écoles en matière de santé publique (VIH/SIDA, paludisme) et pour la gestion durable de l’environnement (gestion des déchets, utilisation d’engrais organique, développement d’énergie renouvelable, etc.) ». Il regrette toutefois de ne pas avoir l’appui financier de son propre gouvernement : « C’est grâce aux gens de notre communauté et à l’expertise de tout un chacun que nous sommes en mesure de réaliser nos projets. En dépit d’un soutien économique de l’État, il y a un fort sens de la communauté et de l’engagement au Mali. C’est le bon côté dans tout cela. » M. Coulibaly a beaucoup voyagé depuis la création de son organisation. Il était de passage pour la première fois au PIFDH le mois dernier, espérant y trouver un appui technique et renforcer les capacités de son organisation à éduquer la population malienne sur ses différents enjeux.

Un îlot de paix

« Il règne ici une ambiance indescriptible », rapporte Isabelle Bourgeois, coordinatrice du PIFDH. En plus de résider sur un campus au paysage enchanteur, les participants vivent ensemble pendant 3 semaines et créent des liens très forts. Ils ont le temps nécessaire pour partager leurs expériences personnelles en matière de lutte pour les droits de la personne et pour générer des idées qui, éventuellement, seront porteuses de changements dans leurs pays respectifs. Utopique peut-être ? Pourtant, le programme donne des résultats concrets.

En Inde, certaines campagnes menées dans des villages par des enfants ont contribué à mettre fin aux infanticides des fillettes. Au Kenya, d’anciens participants ont mené une campagne en faveur de l’éducation obligatoire et gratuite au primaire. Au Congo oriental, des femmes se sont mobilisées lors d’une campagne pour mettre fin à l’impunité dont jouissent les auteurs de violence sexuelle. Les initiatives se multiplient et font des petits.

Montréal se transforme donc, une fois par année, en un îlot de paix où, loin du tumulte quotidien, des militants du monde entier peuvent prendre le temps de réfléchir à l’avenir des droits de l’homme dans leur pays. Un bref répit, après quoi ces 100 héros retournent se battre, chacun de leur côté, pour une plus grande humanité.

** crédit photo : Isabelle Bourgeois

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