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Confessions d’un reporter

jeudi 1er juin 2006, par Charles QUIMPER

Le 26 avril 1986 survenait une explosion à la centrale nucléaire de Tchernobyl. Le photographe Igor Kostine se présenta rapidement sur les lieux et commença à mitrailler le paysage. C’est à travers ses premières photos que le monde pris connaissance de la catastrophe que tentait de cacher le pouvoir soviétique.

« Je ne crois pas qu’une telle catastrophe aurait pu se produire dans un autre pays que l’U.R.S.S. Dès le début des années 1980, de petits incidents se sont succédés à Tchernobyl, sans que personne n’en parle vraiment. Les autorités minimisent tout, n’informent personne, surtout pas la population. » Le gouvernement soviétique conservera la même attitude pendant les années à suivre.

Faisant fi des radiations qui lui bombardent le corps ou des interdictions de passage, Kostine continua de photographier jour après jour, documentant le désastre de façon à ce que son témoignage soit indélébile. Sa caméra a un œil impitoyable et rien ne peut lui demeurer secret. Igor Kostine grimpe sur le toit de la centrale avec les liquidateurs chargés de nettoyer les dégâts, se rend dans les villages rencontrer les paysans, survole le cratère en hélicoptère, dort avec les militaires et visite les victimes dans les hôpitaux. Il descend même sous le sarcophage qui emprisonne le réacteur endommagé pour rapporter les seules images du monstre radioactif.

Dans ce livre on trouvera très peu de ces photos représentant d’affreuses mutations physiques.
Les photographies de Kostine se veulent beaucoup trop humaines pour réduire les victimes à ce genre de sensationnalisme.

Par contre, on y rencontre des milliers d’hommes sans nom : les travailleurs à qui on avait promis de grosses primes pour manipuler des matériaux radioactifs à mains nues, les paysans refusant de quitter leurs demeures, les militaires désorientés qui obéissent aux ordres des assassins assis dans les bureaux de Moscou ou de Kiev.

Et des villages complets éventrés par les grues : des villages vidés de leurs habitants puis enfouis dans la terre pour l’éternité, des cimetières où s’accumulent en vrac des milliers de carcasses de véhicules laissés à l’abandon.

Igor Kostine est une vraie bête, une impressionnante petite machine de guerre, un cow-boy sans peur qui s’expose délibérément aux radiations pour rapporter et documenter, pour protester de façon violente ; un organe de dissidence à lui tout seul.


Confessions d’un reporter

Igor Kostine,

Les Arènes, 2006, 240 pages

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