Comme il est difficile d’être contre la vertu, rares sont les critiques adressées aux Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), adoptés à l’unanimité par l’Assemblée générale des Nations Unies en 2000. Qui s’opposerait en effet à ces objectifs qui visent, entre autres, la réduction du nombre de pauvres, l’éducation de base pour tous, la lutte contre les maladies infectieuses, l’égalité entre les sexes et le développement durable ?
Or, les textes rassemblés dans ces Points de vue critiques du Sud s’emploient à mettre en évidence les insuffisances, les incohérences et les non-dits que cachent, sous leurs dehors fort généreux, les OMD. Les onze auteurs, parmi lesquels on compte des critiques établis de la mondialisation libérale tels que Samir Amin, Patrick Bond et Martin Khor, démontrent que les OMD évacuent des thèmes aussi essentiels que la réduction des inégalités et la justice sociale. Ils soulignent aussi combien les approches préconisées pour mettre en œuvre ces objectifs posent problème. En adoptant la Déclaration du Millénaire, l’Assemblée générale de l’ONU a effectivement fait siennes les thèses de la Banque Mondiale et du FMI sur la bonne gouvernance, l’ouverture des marchés et le soutien au secteur privé. Des stratégies qui, appliquées depuis près de 25 ans dans les pays du Sud, n’ont eu pour résultat que d’y aggraver la pauvreté et les inégalités.
Comme dans d’autres ouvrages collectifs, le message véhiculé par les textes rassemblés ici est parfois un peu répétitif, plusieurs des critiques adressées au concept de bonne gouvernance, notamment, se recoupant passablement. Ce livre a néanmoins le grand mérite de nous faire entendre des voix qui remettent en question les consensus officiellement proclamés sur l’évolution de l’ordre mondial. Il lance un appel éloquent pour des alternatives aux OMD qui se donneraient comme ambition d’établir des démocraties effectives et de concrétiser les droits sociaux essentiels, au bénéfice des peuples du Sud et du Nord.