C’est aujourd’hui un lieu commun de dire que nous vivons à l’ère du néolibéralisme. Une époque où la liberté individuelle l’emporte sur l’égalité sociale, où les valeurs de performance, d’efficacité et de responsabilité personnelles s’imposent devant celles de complémentarité, de partage et de solidarité mutuelle. Un monde où l’État est perçu comme un obstacle à la croissance économique et où le libre marché doit régner en maître. Où les normes du travail et le salaire minimum apparaissent comme des rigidités qui entravent le jeu de l’offre et de la demande. Où la fonction publique devrait être perçue comme une bureaucratie inutile et les entreprises comme socialement responsables. Où les syndicats défendraient des intérêts corporatistes rétrogrades et les grands patrons seraient philanthropes. Où les groupes communautaires sont accusés d’immobilisme alors que les milieux d’affaire s’approprient la dignité des uns, et les montagnes de tous, au nom de l’intérêt public. Où les pauvres se font couper l’aide sociale alors que les entreprises reçoivent des subventions. Où les impôts baissent et les tarifs augmentent. Où la dette privée remplace la dette publique. Où l’aide au développement sert à acheter des armes. Où l’éthique des affaires et les codes de conduite remplacent la loi contraignante. Où les capitaux et les marchandises font le tour du monde alors que les personnes sont bloquées aux frontières. Où le développement ne peut être durable que s’il est rentable. Où les travailleurs sont du capital humain, les problèmes écologiques un mal nécessaire et le travail des enfants de la concurrence déloyale...
Au Québec, de nombreuses organisations se mobilisent contre les conséquences désastreuses de ce capitalisme exacerbé, et ce depuis de nombreuses années. Malheureusement, force est de constater que le néolibéralisme poursuit son implacable avancée dans tous les aspects de notre vie, et que son idéologie s’impose sans cesse comme une évidence incontournable à laquelle il faudrait se rallier en toute lucidité. Contre l’emprise de cette pensée unique et imposante, il nous faut aller encore plus loin que nos mobilisations actuelles. Nous devons innover et multiplier les réponses créatives afin que puisse advenir, ici comme ailleurs, une société juste et équilibrée.
Construire l’alternative : vers le Forum social québécois
Le Forum social québécois (FSQ) entend se placer dans la continuité des forums sociaux qui se tiennent un peu partout dans le monde et à différentes échelles depuis 2001. Le FSQ se veut un espace de prise de parole, d’échange, de dialogue, d’éducation populaire, de pratique citoyenne, de réseautage et d’élaboration de programmes d’actions concertées dans le but de stimuler le dynamisme des mobilisations sociales et de la vie démocratique afin de construire, ensemble, une société solidaire, démocratique, juste et durable au Québec.
Le FSQ découle ainsi d’une logique mondiale de recherche d’alternatives. Mais il se teinte aussi d’une couleur qui lui est propre. Depuis quelques décennies, les impératifs de croissance, de compétitivité et de réduction de la dette alimentent au Québec une pensée unique et un discours hégémonique qui cherchent à justifier les mesures imposées pour soumettre chaque jour davantage la société au diktat du marché. Ceci s’opère au détriment des travailleurs et des travailleuses, des femmes, de l’environnement, des étudiants, des communautés autochtones, des marginalisés de toutes sortes, des organisations de la société civile et des générations futures.
Confrontés à cette détérioration de nos conditions de vie et à ce discours néolibéral omniprésent, seules notre solidarité, notre détermination et notre créativité permettront d’opposer une multitude de solutions capables de redonner un sens à notre volonté de vivre ensemble et de progresser vers un modèle de société apte à reconnaître la dignité de chaque être humain et à respecter la vie en général. C’est pour cette raison fondamentale que nous devons nous doter d’un espace collectif de réflexion stratégique et de construction de la société québécoise de demain : le FSQ. Le Québec avait emboîté le pas de la mouvance altermondialiste lors du Sommet des peuples d’avril 2001, dans une capitale nationale transformée en camp retranché. Le Québec doit aujourd’hui poursuivre son engagement en organisant son premier forum social, à Montréal du 23 au 26 août 2007.
Il est temps d’unir nos expertises et de créer les synergies nécessaires pour changer les choses chez nous. Le FSQ est un espace pluriel dont la force réside dans la diversité et où chacun a sa place. Rassemblons donc toutes les forces vives du changement social dans ce travail collectif pour imaginer un Québec différent, construit autour des idéaux de solidarité, de partage, de justice et de respect mutuel. Nous vous invitons à participer au Forum social québécois et à son organisation afin que tous ensemble nous puissions clamer haut et fort qu’un autre Québec est non seulement possible, mais, surtout, réalisable.
Investissez le FSQ ! Cet espace vous appartient. C’est à notre tour de penser le Québec !