Le budget participatif initié à Porto Alegre par le Parti des travailleurs (PT) est un processus annuel où les élus et les habitants établissent ensemble les priorités d’investissement pour l’année à venir. Les citoyens déterminent d’abord leurs principaux besoins (santé, espaces verts, électricité, voies publiques, etc.) dans chacun des 16 secteurs de la ville et élisent deux membres qui siègeront au conseil du budget participatif, là où sont élaborés les critères d’investissement tels que la population totale ou le degré d’insuffisance de services des secteurs. À la suite de quoi le plan annuel d’investissement est élaboré.
On estime à plus de 15 000 personnes participant annuellement au processus du budget participatif à Porto Alegre. Les citoyens et citoyennes ont ainsi un accès direct pour faire valoir leurs revendications et un processus de reconnaissance de ces dernières. Les élus, quant à eux, reconnaissent et assument leur imputabilité. C’est ce qui fait de Porto Alegre, l’une des expériences de démocratie participative les plus avancées à travers le monde. Sous diverses formes et avec des pouvoirs citoyens plus ou moins dilués, le budget participatif a été repris dans des centaines de villes du monde entier (Europe, Inde, Sénégal, Amérique latine et même Guelph en Ontario). Motivé par cette expérience, le réseau Démocratiser radicalement la démocratie a vu le jour en 1999 afin de faire progresser la démocratie participative à travers le monde.
Et Montréal ?
Pour Anne Latendresse, professeure de géographie à l’UQAM, la décentralisation amorcée à Montréal pourrait faciliter la mise sur pied d’un budget participatif, puisque les arrondissements sont maintenant responsables de leurs budgets et de leurs structures. « Ici, nous avons un mouvement communautaire assez fort pour démarrer une telle initiative. Il ne faut pas attendre l’arrivée d’un parti de gauche comme ce fut le cas au Brésil pour agir et revendiquer la démocratisation du budget », soutient Luc Rabouin, organisateur communautaire de retour d’un séjour de cinq mois à Porto Alegre consacré à l’étude du budget participatif. Selon lui, la forte organisation du mouvement communautaire montréalais est le pivot central et la principale condition favorable d’implantation d’un budget participatif à Montréal.
L’expérience pourrait d’abord débuter dans deux ou trois arrondissements ciblés. Le Groupe de recherche sur la démocratie municipale et la citoyenneté (Grdmc) animé par la Société de développement communautaire de Montréal (SodecM) a multiplié les ateliers de formation sur la question dans des groupes communautaires et même auprès d’élus, si bien que l’idée a fait son chemin et aujourd’hui l’ensemble des élus connaissent l’expérience, aux dires de Dimitri Roussopoulos, président de la SodecM.
Vers un agenda citoyen
Le Troisième Sommet des citoyens et citoyennes de Montréal organisé par la SodecM sera l’occasion de lancer le débat sur la place publique et de dépasser le simple atelier de formation. Les organisateurs espèrent que le Sommet débouchera sur la création d’un groupe de travail sur le budget participatif. Mais ce ne sera pas la seule dimension du Sommet qui vise à créer un espace de discussions et d’élaboration de propositions en vue de bâtir un véritable agenda citoyen vers la démocratie participative à Montréal. Pour alimenter les réflexions, des invités du Brésil, d’Europe et de villes canadiennes seront présents. Devant les grands enjeux qui attendent Montréal tels que les prochaines défusions ou les critères de compétitivité imposés par l’agenda néolibéral, un Sommet des citoyens et citoyennes prend toute son importance : un rendez-vous.