Chose du passé, l’ajustement structurel ? Certes le terme, largement discrédité
à la suite d’intenses luttes menées au Sud comme au Nord, n’apparaît
plus dans le jargon officiel des instances financières internationales. Les
politiques, elles, supposément vouées à redresser l’économie et les services
publics des États en développement à coups de grands virages néolibéraux,
ne cessent pourtant de réapparaître en filigrane des nombreux plans de
« réduction de la pauvreté ». Ces derniers sont aujourd’hui mis de l’avant
par les bailleurs de fonds, par l’entremise de stratégies « nationales », afin
d’en garantir la légitimité.
L’Afrique continue ainsi d’être la cible de politiques de développement à
visage inhumain : dérégulation des marchés, dévaluation des monnaies,
privatisation des derniers remparts nationaux, coupures massives dans les
services sociaux... Et depuis que l’Organisation mondiale du commerce
(OMC) a fait des services publics son ultime cheval de bataille, les secteurs
de l’éducation, de la santé, de l’eau potable, du logement social et des
transports ne peuvent être « améliorés », nous dit-on, qu’à coups de
privatisations et de partenariats public-privé. C’est par l’entremise des
Documents stratégiques de réduction de la pauvreté et de l’Initiative des
Pays pauvres très endettés (PPTE) que les nations africaines se voient
aujourd’hui forcées de vendre leurs services publics d’eau, de restructurer
leurs écoles et hôpitaux, ou de privatiser leurs chemins de fer nationaux.
Le cas du Mali
Aujourd’hui, la médecine néolibérale appliquée au Mali sur le plan des
services de santé se traduit par des coupures massives et l’envoi en
préretraite des faibles effectifs de médecins et d’infirmières du pays qu’on
remplace par des « volontaires de la santé », non formés et sous payés.
D’une actualité criante, la privatisation du chemin de fer malien, qui relie
Dakar à Bamako, est l’un des importants combats menés actuellement par
les mouvements sociaux maliens. Afin « d’améliorer » les transports publics,
le gouvernement a fait appel à la firme canadienne CANAC, par l’entremise
d’un partenariat public-privé. Déjà, 26 des 36 gares que comptaient le pays
ont été fermées. Et, signe que le salut de l’Afrique passera principalement
par l’exportation de matières premières (!), le transport des passagers a tout
simplement été aboli.
C’est autant de villages, fondés en bordure du rail malien au cours des
50 dernières années, qui sont aujourd’hui menacés de fermeture. Vivants
principalement de l’économie informelle articulée autour du transport, ses
habitants sont dorénavant confrontés non seulement à la disparition de leur
gagne-pain, mais aussi à un réseau routier des plus rudimentaires.
À l’heure où les partenariats public-privé nous sont vendus au Québec
comme la solution pour maintenir à flot nos services publics, les militants
africains ont sûrement beaucoup à nous apprendre sur les « résultats » d’une
« réingénirie » qu’ils n’ont jamais souhaitée.