Au début, la guerre a été déclenchée par une opération de Hezbollah ayant mené à la capture de deux soldats israéliens sur un petit coin du territoire libanais, les fermes de Chebaa, le long de la frontière libano-israélienne. Il faut dire que toute cette région est explosive. Jusqu’en 2000, l’armée israélienne occupait une grande partie du sud du Liban. Après des années de durs combats menés par la résistance libanaise, les Israéliens se sont finalement retirés, mais avec beaucoup d’amertume et de honte. Depuis, le gouvernement israélien rongeait son frein en attendant son heure.
Selon deux journalistes du quotidien israélien Haaretz, l’opération de Hezbollah a servi en fait de prétexte commode .Lors de sa comparution devant la commission d’enquête mise en place par le Parlement israélien, le premier ministre Ehud Olmert a affirmé que le plan appliqué avait été approuvé quatre mois auparavant. Pour sa part, le chercheur français Alain Dieckhoff, un des coauteurs du bouquin Une guerre de 33 jours estime que l’objectif israélien était de « rétablir une capacité de dissuasion qui aux yeux des responsables militaires israéliens avait été sérieusement entamée après les deux retraits unilatéraux du Liban-Sud et de Gaza ».
Bref, il fallait qu’Israël fasse étalage de sa force, d’autant plus que cet exercice était en phase avec les ambitions américaines dans la région. Depuis des mois en effet, l’administration Bush prépare de nouvelles aventures militaires, notamment contre l’Iran. L’attaque contre le Liban devait donc être, dans un sens, une srépétition générale.
On le sait maintenant, cette guerre a été un autre fiasco pour Washington et Tel-Aviv. Certes depuis, l’administration Bush essaie de réparer les pots cassés en manipulant la crise libanaise pour marginaliser Hezbollah. Mais celui-ci est ressorti de la guerre encore plus fort. Selon Élizabeth Picard, non seulement Hezbollah a-t-il reconstitué ses capacités militaires, mais « il est en mesure de mettre la force de l’ONU en difficulté face à Israël. Ayant marqué sa distance avec Damas, souligné la différence de ses intérêts avec ceux de Téhéran et confirmé sa solidarité avec Hamas, Hezbollah s‘est désormais imposé comme un acteur incontournable de la scène proche-orientale, dans la guerre ou la négociation ».
Entre-temps, souligne Sami Makki, « une cassure s’est produite entre la société israélienne et ses institutions. L’armée a été tenue en échec, ce qui est difficilement supportable. Dans ce climat instable, le gouvernement pourrait refuser l’équilibre précaire imposé de l’extérieur tandis que l’opinion publique pourrait inciter l’armée à frapper plus fort lors d’une prochaine intervention. Pourtant, l’histoire des guerres indique que pour Israël, la réponse militaire ne peut en aucun cas apporter une solution durable ».