Les mercenaires de Kadhafi, issus de toutes les guerres africaines

jeudi 24 février 2011, par Colette BRAECKMAN

Les « mercenaires africains », dont certains s’expriment en français et qui sont en première ligne de la répression des manifestants sont le résidu de tous les conflits dans lesquels le président libyen s’est ingéré durant quatre décennies.

Au début des années 70, peu après sa prise de pouvoir, Kadhafi, qui rêve de prendre la tête d’un grand Etat saharien, se présente comme le protecteur naturel de tous les peuples nomades du Sahara et du Sahel. Entrant en concurrence avec la France qui soutient les régimes post coloniaux, il contribue à la formation militaire de la future rébellion touareg en intégrant de jeunes nomades, frappés par la sécheresse au Mali et au Niger, dans une « Légion islamique » qui s’entraîne dans le sud de la Libye. Cette Légion sera la matrice d’où sortiront les combattants du GSPC puis de l’AQMI (Al Qaida au Maghreb islamique). Kadhafi intervient aussi au Tchad, où il soutient les nomades toubous et leur chef Goukouni Oueddei, puis Hissène Habré et enfin le chef d’Etat actuel Idriss Deby.

Par la suite, Kaddhafi élargit son champ d’action : via le Tchad, il appuie certains groupes rebelles du Darfour, et en Afrique de l’Ouest, soutient Charles Taylor au Liberia et Lansana Kouyaté en Guinée. Les adversaires de Mobutu sont régulièrement accueillis à Tripoli et, en 1986, une délégation congolaise dont fait partie Laurent-Désiré Kabila échappe de justesse au bombardement américain…C’est que l’Afrique centrale intéresse le Guide de la révolution libyenne : il se présente comme le « roi des rois traditionnels » et voudrait financer un projet pharaonique, réalimenter le lac Tchad puis la nappe phréatique libyenne grâce aux eaux du fleuve Congo ! C’est ainsi qu’en Centrafrique, en 2002, Kadhafi appuie le président Ange Patassé que les Français souhaitent remplacer par François Bozize. Lorsque l’armée centrafricaine fait appel aux troupes de Jean-Pierre Bemba, basées dans la province congolaise de l’Equateur, c’est Kadhafi qui paie la facture du corps expéditionnaire congolais, dont les exactions vaudront à Bemba de se retrouver inculpé par la Cour pénale internationale. Par la suite, ayant occupé en 2009 la présidence de l’Union africaine, Kadhafi assagi traitera avec les chefs d’Etat en place, tout en continuant à entretenir d’innombrables réseaux parallèles, composés de tous les « soldats perdus » de ses guerres africaines. Pour mater la révolte, il n’a eu qu’à puiser dans cet immense vivier de mercenaires potentiels…


Voir en ligne : Le blog de Colette Braeckman

Vous avez aimé cet article?

  • Le Journal des Alternatives vit grâce au soutien de ses lectrices et lecteurs.

    Je donne

Cet article est classé dans :

Partagez cet article sur :

  •    
Articles de la même rubrique

Publications

Notre maison brûle et nous regardons ailleurs !

Articles du même auteur

Colette BRAECKMAN

Sud Soudan : Hollywood n’avait pas prévu ce scenario là

Articles sur le même sujet

Révolution

Le féminisme sous la loupe de la jeunesse égyptienne

Je m’abonne

Recevez le bulletin mensuel gratuitement par courriel !

Je soutiens

Votre soutien permet à Alternatives de réaliser des projets en appui aux mouvements sociaux à travers le monde et à construire de véritables démocraties participatives. L’autonomie financière et politique d’Alternatives repose sur la générosité de gens comme vous.

Je contribue

Vous pouvez :

  • Soumettre des articles ;
  • Venir à nos réunions mensuelles, où nous faisons la révision de la dernière édition et planifions la prochaine édition ;
  • Travailler comme rédacteur, correcteur, traducteur, bénévole.

514 982-6606
jda@alternatives.ca