Les conflits accélèrent la propagation du VIH/sida en Afrique subsaharienne, exposant surtout des jeunes dans une région déjà très durement frappée par la pandémie mondiale, indique l’association caritative Save the Children basée en Grande-Bretagne, dans son rapport du 9 juillet, VIH et conflits : une double situation critique.
« Si le VIH dans les situations de conflit n’est pas abordé, nous risquons de voir le VIH croître dans les zones de conflits en Afrique subsaharienne à moyen terme, entretenant l’infection dans les zones "pacifiques" avoisinantes », prévient cette semaine Doug Webb, conseiller pour le VIH/sida au bureau du R.U. de l’International Save the Children Alliance.
Le VIH se propage rapidement pendant la guerre et dans les situations de conflit. La cause : de grands nombres de personnes sont obligés d’abandonner leurs domiciles, entraînant une escalade de la violence et de l’exploitation sexuelles ainsi qu’une interruption des services vitaux de santé et d’éducation qui prive les populations de l’accès aux services de prévention et de traitement du VIH, selon le rapport.
Sorties de force de leurs maisons par les conflits, les jeunes filles sont particulièrement exposées à l’infection par le VIH. Pendant leur fuite de la guerre, les filles et les jeunes femmes sont souvent sexuellement agressées et exploitées par des soldats et des forces rebelles.
Laissées sans abri et sans ressources, les filles ont souvent recours à un troc du sexe contre de la nourriture, de l’argent et des médicaments. « Beaucoup de jeunes filles sont forcées de se vendre pour survivre. Nous n’avions pas le choix », aurait déclaré Goretti, âgée de 18 ans et originaire du Burundi, citée par le rapport de Save the Children. « Les filles qui le font ont 14 ans et plus, elles sont surtout des filles pauvres qui ont été déplacées par la guerre - la guerre a manifestement accru ce troc sexuel », affirme encore Goretti.
Goretti - nom fictif - vit dans un camp pour des personnes déplacées à l’intérieur du Burundi, un pays qui sort de plusieurs années de guerre. Elle est séropositive, une des 13 % de jeunes femmes qu’on croit porteuses du VIH au Burundi.
« Beaucoup de jeunes filles sont infectées par le VIH au Burundi. La plupart sont des orphelines ou des déplacées qui n’ont aucun logement, rien à manger et rien à faire. Elles sont obligées de s’infecter pour survivre », déplore Goretti. « De jeunes veuves dans des camps de déplacées ne peuvent pas regarder leurs enfants mourir de faim alors elles vendent le sexe pour obtenir de l’argent », ajoute Claudine, âgée de 15 ans, et vivant également dans le même camp que Goretti.
Le problème du VIH/sida est passé sous silence dans les pays déchirés par la guerre et dans les pays où les conflits viennent de cesser, d’après le rapport. En Sierra Léone où le viol était courant pendant cette guerre civile des plus brutales d’Afrique, le gouvernement doit encore élaborer un plan sur la manière de combattre le VIH. Des groupes non gouvernementaux tentent de combler ce vide, mais ils n’ont pas le financement nécessaire pour élargir des services déjà étendus à des régions contrôlées autrefois par des rebelles, indique le rapport.
La soi-disant « double situation critique » est très importante en Afrique où environ 28 millions d’Africains, soit 70 % de la population porteuse du VIH à travers le monde, sont infectés par le virus qui cause le sida, alors que la plupart des conflits du monde ont lieu sur le continent africain.
Selon le rapport de Save the Children, 680 000 enfants ont perdu leurs parents des suites du sida en République démocratique du Congo où la plus grande guerre du continent fait rage depuis 1998.
Au Rwanda, jusqu’à 15 000 femmes sont tombées enceintes alors qu’elles ont été violées pendant le génocide de 1994. Des 2 000 femmes testées, 80 % étaient séropositives.
Le plus grand groupe de défense des droits de l’enfant au monde, Save the Children, a profité de la conférence du 7 au 12 juillet de Barcelone sur le VIH/sida pour exhorter la communauté internationale à prendre une mesure pour endiguer la propagation du VIH/sida dans les pays affectés par les conflits. Selon le groupe, ceci est possible si les bailleurs augmentent le financement au Fonds mondial pour combattre le sida, la tuberculose et le paludisme, qui doit alors s’assurer que les pays affectés par les conflits obtiennent la part du lion dans le financement.
Penny Dale, Inter Press Service, Agence de Presse du tiers-monde (IPS)