FSM 2006 - Caracas

La culture organisationnelle vénézuélienne et le Campement intercontinental de la jeunesse

mardi 24 janvier 2006, par Manon Ruel, Simon-Olivier CÔTÉ

Le lieu où se tiendra le Forum social mondial est en soi un geste stratégique et politique. Porto Alegre, au Brésil, fut retenu en 2001 puisqu’on y retrouvait un système politique municipal basé sur des principes de démocratie participative et un budget participatif, dont souhaitait s’inspirer le mouvement. Le Campement Intercontinental de la Jeunesse (CIJ), où peuvent séjourné les participants au Forum, s’est développé en parallèle comme lieu privilégié de mise en pratique des discours et des idéaux véhiculés durant le FSM. Initié au Brésil, le Campement est devenu un espace pour vivre concrètement les alternatives sociales, écologiques, économiques et politiques portés par ses participants.

Cette année, le Venezuela a été retenu puisque la révolution bolivarienne, mise en place par le gouvernement Chavez, constitue une initiative sociale non négligeable en remettant l’économie au service du peuple. Les missions d’alphabétisation et de soins de santé, établies dans les quartiers défavorisés, sont des points fort positifs de la révolution bolivarienne. Les bénévoles internationaux, en provenant du Brésil, du Pérou, de la Colombie et du Québec, arrivés depuis plus d’une semaine pour participer à la mise sur pied du CIJ, ont cependant dû faire face à une culture institutionnelle où il est encore difficile de s’insérer. Il y a donc lieu de se questionner sur les possibilités d’inclusion d’un gouvernement encore ancré dans une culture organisationnelle verticale.

Rappelons que les principes à la base du Campement sont ceux d’autogestion et de coopération. Une coordination basée sur la démocratie participative, une gestion écologique de l’environnement et le travail solidaire en constituent les fondements. Bien entendu, l’accueil de plusieurs milliers de participants requiert la collaboration des autorités gouvernementales et municipales notamment dans la mise sur pied des infrastructures tels que les toilettes, les douches et le matériel de construction du Campement. Cependant, selon un ancien membre du comité organisateur au Brésil, la réalisation des tâches à accomplir se fait habituellement de concert avec les autorités en place. Cette année, elle fut gérée de façon indépendante des visions des participants, ne laissant au départ que très peu de place aux initiatives. De plus, les autorités locales interdisaient encore l’accès au site 3 jours avant l’événement. Pour certains, ce fonctionnement représente une incompréhension du processus à la base du CIJ au cours duquel, on devrait plutôt voir se mettre en place une forme de travail coopératif. Sans parler des nombreux problèmes de communication entre les différentes commissions et des retards dans les préparatifs dont était responsable le Comité Facilitateur composé de Vénézuéliens chargés de coordonner l’événement avec les différents ministères.

Notons que l’appartenance politique au parti de Chavez revêt une importance telle qu’elle caractérise une majorité des interactions entre les individus et les institutions. Il va sans dire que certains ministres auraient aimé que davantage d’espace soit accordé à leur président, cependant le Comité Hémisphérique aurait insisté pour que le Forum demeure un espace neutre afin d’éviter que les partis en profitent pour se faire du capital politique. Ceci aurait également constitué un obstacle dans le déroulement des préparatifs.

Au cours des premiers jours de la mise sur pied du Campement, nous avons donc pu voir s’entrechoquer la culture organisationnelle du campement basée sur l’autogestion, le travail en équipe et la coopération que portent les participants internationaux et la tradition encore hiérarchique et verticale des fonctionnaires vénézueliens peu familiers avec ces principes. Malgré ces lacunes, il semble que le désir de retrouver la voie de l’autogestion durant l’événement soit présente, ce que nous verrons avec la venue en masse des participants dans les prochains jours. Reste à voir comment l’organisation vénézuélienne parviendra à conjuguer les initiatives des participants avec leur culture locale.


 Manon Ruel, bénévole au sein du comité communication CIJ
 Simon-Olivier Côté, bénévole au sein du comité communication FSM

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