Exposition d’art contemporain autochtone

Hochelaga revisité

jeudi 26 mars 2009, par Amélie TENDLAND

Hochelaga. Peu d’entre nous s’en souviennent, mais c’est le nom qu’a porté l’île de Montréal pendant des siècles. Réunies jusqu’à la fin avril au MAI, les œuvres de six artistes autochtones canadiens tentent de faire le pont entre l’histoire occultée d’Hochelaga, terre des Iroquois du Saint-Laurent, et le Montréal contemporain.

Des premiers voyages de Cartier il y a près de 500 ans à aujourd’hui, que reste-t-il de la présence autochtone à Montréal ?

Avec Hochelaga revisité, textes, tableaux, vidéos et photographies se penchent sur la marginalisation et le manque de reconnaissance que subit la communauté autochtone dans la métropole québécoise.
L’idée de cette exposition, où l’île de Montréal est abordée comme une terre conquise par les Européens aux dépens des Premières nations, a germé dans la tête du commissaire de l’exposition, Ryan Rice, pendant quelques années. Mohawk de Kahnawake, l’artiste explique que l’idée lui est d’abord venue à la suite des nombreux événements artistiques autochtones ou métis auxquels il a participé avec succès ailleurs au pays.
Montréal en retard

« Si vous portez attention à ce qui se fait dans les musées et les galeries d’art dans le reste du Canada, vous vous apercevez que Montréal et le Québec connaissent un important retard. Avec cette exposition, j’ai voulu redresser la situation. »

L’artiste mohawk cite en exemple le cas d’une récente exposition du Musée d’art contemporain de Montréal consacrée aux jeunes artistes émergents : aucune œuvre d’artistes autochtones n’y était présentée. M. Rice déplore que le Musée n’ait jamais acquis d’œuvre d’art amérindien : « Pourtant, 13 Premières nations sont présentes au Québec et plus de 65 000 autochtones vivent à Montréal. »

À partir de ce constat, Rice a eu l’idée de présenter l’île comme un espace occupé, où la présence ancestrale des Iroquois aurait soudainement disparu après le passage de Cartier à la fin du 16e siècle. Selon l’artiste, les échanges entre Européens et Amérindiens qui ont perduré pendant des siècles, le commerce de fourrures ou la Grande Paix de 1701, ont été complètement évacués de la mémoire de l’île. L’histoire montréalaise est à son avis amnésique.

« Avec cette exposition, je veux faire prendre conscience aux gens de la présence des autochtones, de leur histoire et de leur art contemporain. S’ils ont été complètement occultés des livres d’histoire et de la mémoire actuelle des habitants de l’île, ils n’en sont pas moins vivants et constants depuis l’arrivée de Cartier. »

Séjour d’artistes à Montréal

Pour réaliser ce projet, M. Rice a réuni six artistes autochtones renommés qui possèdent tous un point en commun : ils ont tous, au cours de leur parcours, résidé un certain temps dans la métropole. Les œuvres présentées reflètent leur expérience montréalaise à la fois en tant qu’artiste et en tant qu’autochtone. Leur histoire personnelle s’inscrit ici dans la grande histoire amérindienne. « Je voulais connaître quelle place a joué Montréal dans leur vie, dans leur carrière. Je voulais savoir pourquoi ils n’y sont pas restés », explique l’organisateur de l’exposition.

Lori Blondeau est une artiste de performance crie de Saskatoon, internationalement reconnue. Jason Baerg, artiste d’arts visuels métis, a pour sa part récemment gagné le prix de l’artiste émergent de l’année en Ontario. Cathy Mattes est écrivaine métisse et commissaire indépendante à Winnipeg, alors qu’Ariel Lightningchild Smith a vu ses vidéos récompensées par de nombreux prix dans plusieurs festivals. Martin Loft est un photographe mohawk, qui fut actif au début des années 1980 avec la National Native Photographers Association. Enfin, Nadia Myre, artiste multidisciplinaire algonquine, expose ses œuvres à travers toute l’Amérique du Nord.

Les visiteurs découvriront notamment une vidéo expérimentale de Lightningchild Smith sur les diverses formes de conquête, une œuvre abstraite de grand format de Baerg représentant une carte de Montréal, ainsi que des portraits d’Amérindiens montréalais réalisés par Martin Loft.

Table ronde et séance vidéo

À noter que le documentaire en anglais Qallunajatut (Urban Inuk), réalisé en 2005 par Jobie Weetaluktuk, sera présenté le 25 mars à 18 heures. La projection du documentaire relatant le périple estival de trois Inuits dans la jungle montréalaise sera suivie d’une conversation bilingue avec le réalisateur.

Une table ronde en anglais est également prévue le 2 avril. Animée par le commissaire Ryan Rice, on y abordera la représentation autochtone à Montréal. Des intervenants des milieux artistique et communautaire seront sur place.


Hochelaga revisitée se déroule jusqu’au 25 avril au MAI, 3680, rue Jeanne-Mance à Montréal.

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