Gordon Sheppard : des révélations d’intérêt public

samedi 27 août 2005, par David HOMEL

Les oeuvres du photographe, cinéaste et écrivain montréalais, Gordon
Sheppard, ont étonné son public tout au long de sa carrière. Son livre
Ha ! : a self murder mystery, mi-roman, mi-chronique, présente le Québec
des années 1960 à travers le suicide d’Hubert Aquin.

Publié en 2003 aux McGill-Queen
University Press, il a été louangé
par les critiques des deux communautés
linguistiques de Montréal.
Il s’agit d’un livre objet de presque
900 pages. On y retrouve, entre
autres documents, un fac-similé
du dernier mot qu’a écrit Aquin
avant de tirer sa révérence, en
1977. Sheppard avait également
fait paraître Signé Hubert Aquin,
enquête sur le suicide d’un écrivain,
aux Éditions du Boréal Express, à
Montréal, en 1985.

Il y a de nouveaux objets de Gordon
Sheppard qu’on peut admirer à la
galerie du salon b, au 4231b, boulevard
Saint-Laurent, à Montréal,
jusqu’au 11 septembre. Les photos
que Sheppard nous propose m’ont
surpris. Ce sont des images de nénuphars
et d’herbes caressées par
les eaux. L’exposition s’appelle
Visions d’eau, et elle s’inspire directement
du jardin du peintre Monet,
à Giverny. Ce qui m’a surpris, c’est le
sentiment de paix dans le mouvement
qui habite ces photos, l’extrême attention
aux détails de la nature. On dirait
que Sheppard, après une carrière très
variée et une vie tumultueuse, a justement
trouvé la paix.

Ne nous étonnons pas que l’exposition
ait lieu au salon funéraire, le
Alfred Dallaire Memoria, créé par
Jocelyne Légaré. (D’ailleurs, ce lieu
vaut le détour, quelle que soit l’exposition
en cours.) Gordon Sheppard
a toujours enquêté sur la mort.
Effectivement, Ha ! est une méditation
sur le suicide et sa relation avec
l’art et la politique. L’un des livres essentiels
pour comprendre le Québec
actuel. Multilingue, il devrait sortir
sous peu chez Hurtubise HMH.

En regardant les photos de Visions
d’eau, on dirait que Sheppard, après
presque dix ans à partager son corps
avec le cancer, a trouvé un équilibre
entre l’impossibilité de l’existence et
le besoin de continuer son cheminement
personnel. Il qualifi e le
travail de l’artiste de « révélations
d’intérêt public ». Les photos sont
présentées dans des boîtes, ornées
de feuilles d’or, telles des icônes.
Mais au lieu d’abriter des images de
la Vierge, les boîtes nous permettent
de contempler la fl eur d’un
nénuphar, ou les ondes dessinées
par des herbes dans un ruisseau.

Est-ce surprenant qu’un homme se
tourne vers la spiritualité alors que
la maladie le frappe ? Sheppard,
né à Montréal, mais ayant vécu à
Toronto jusqu’en 1966, parle de la
force spirituelle de notre ville qui
émane de ses racines catholiques.
Pendant que les Québécois catholiques
s’efforcent d’oublier leur enseignement
religieux, Sheppard y
fait le tri, et y trouve des sources
d’inspiration.

Et si ça lui permet de travailler et
de rester en vie, tant mieux.

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