Au matin du mercredi, 9 février 2011, une marche en faveur de la libre circulation des peuples, se déroulait à Dakar, au Sénégal. L’activité, qui regroupait des centaines de personnes, dénonçait les politiques d’immigrations de l’Union Européenne.
« La terre appartient à tous, elle n’est que délimitée par des politiques discriminatoires ». C’est ce qu’argumentaient les manifestants luttant pour la liberté de circuler. Pour la plupart des migrants africains, asiatiques ou sud-américains, la traversée des frontières européennes est un voyage difficile et risqué. Demander un visa ou un statut de réfugié peut s’avérer être un type de démarche s’échelonnant sur une dizaine d’années, voir plus. La migration clandestine peut alors sembler un compromis acceptable pour certains. La traverser le désert ou la mer est toutefois une expérience dangereuse voir même mortelle. Et l’arrivée à bon port, ne garantit en rien l’obtention du statut de réfugié. Après avoir passé par les centres de détention de migrants, plusieurs immigrants clandestins seront retournés dans leur pays d’origine par avion. Ce sera le retour à la case départ, avec leurs économies en moins, le tout englouti par cette aventure. D’autre part, des centaines d’Africains se retrouvent sans-papiers, bloqués à Dakar, Bamako ou Rabat, cherchant un moyen de passer les frontières. Bon nombre d’organisations non gouvernementales travaillent afin de lutter contre cette problématique et demandent l’assouplissement des frontières. Ils accusent d’ailleurs les dirigeants africains de cautionner les politiques migratoires inégalitaires et d’exécuter les règles d’immigration appliquées par l’Union européenne. C’est alors en face des bureaux de Frontex à Dakar, que les partisans pour la libre circulation des peuples avaient donné le coup d’envoi de la manifestation, ce mercredi 9 février 2011. Ils s’opposaient ainsi à l’implantation de bureaux régionaux destinés au contrôle de l’immigration à l’extérieur même des frontières de l’Union Européenne.
Contrôle des frontières
C’est Frontex, l’agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures, qui assure le contrôle d’immigration en Union Européenne (UE). Frontex justifie ses activités en affirmant que les chiffres parlent d’eux-mêmes. Les 42,672 km de frontières maritimes et 8,826 km de frontières terrestres doivent être protégés sous un impératif de sécurité régionale. Ce contrôle nécessite donc une gestion des frontières regroupée sous six grands axes importants. Frontex s’occupe donc de la question de formation et entraînement du personnel de contrôle ; de collecte d’information et de données ; d’analyse des risques concernant la sécurité ; et de coordination d’opérations telle que le rapatriement de réfugiés clandestins. Avec quelque 300 millions de personnes qui ont voyagé et traversé les frontières en 2009, Frontex semble considérer la hausse d’immigration comme une menace. En plus de fournir quelque 400 000 gardes frontaliers, l’agence de l’Union Européenne a par ailleurs, développé une unité d’intervention spéciale appelée RABITs (Rapid Border Intervention Teams). Cette unité permet donc une rapide assistance technique et humaine en cas d’un « urgent et exceptionnel » problème migratoire aux frontières des États membres. C’est là que le slogan de Frontex « Libertas Securitas Justicia » ne semble pas trop coller aux merveilleux principes démocratiques qu’il affirme.
Migrations
Quels enjeux ?
Quelles mobilisations pour une gouvernance mondiale ?
Lors de l’évènement de clôture du forum social mondial, de Dakar 2011, la déclaration de l’assemblée de convergence sur la migration s’est positionnée en faveur d’une ouverture des frontières. La déclaration avait pour objectifs de faire reconnaître les droits des migrants et d’établir une justice entre la problématique de migration et du développement. L’assemblée de convergence demandait donc à tous les États membres, la ratification de la Convention des Nations Unies sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille. On revendiquait aussi l’élaboration d’une charte pour le droit de libre circulation des peuples et la fermeture des centres de détentions des réfugiés. C’est avec les propositions telles que la création d’un passeport global et d’une charte mondiale des migrants que le droit à une citoyenneté universelle est mis de l’avant. Il a d’ailleurs été dit, dans le discours de clôture sur l’immigration, que la diaspora africaine représentait le « sang neuf de l’Afrique », l’une de ses richesses et qu’il était à présent inconcevable de ne pas considérer la mouvance mondiale. Les Africains se retrouvent alors face à un dilemme ayant des origines historiques. Vidé de ses richesses tels le café, le coton et le minerai, ressources qui traversent librement les frontières, le continent africain se voit forcé de faire face à une crise alimentaire. Figure tragique de notre époque, les migrants sont le produit d’un devenir insensé, entre le choix d’une la vie chère et une vie de « débrouille », le quitte ou double du voyage est un pari séduisant. L’Europe fait miroiter l’idée d’un avenir meilleur.
Le thème de l’immigration a donc transcendé plusieurs événements et ateliers lors du Forum social mondial de 2011. Par ailleurs, les Africains ont pu profiter de la vitrine offerte par le FSM pour appeler à l’élévation à un niveau supérieur d’une conscience politique mondiale et à la sensibilisation à la problématique de l’immigration contemporaine.